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La vie monastique dans le diocèse de Poitiers

La vie monastique dans le diocèse de Poitiers
  • La vie monastique, selon la Règle de Saint Benoit, dans le diocèse de Poitiers. Fondée vers 552, par Sainte Radegonde, la communauté a quitté le centre ville de Poitiers pour s'installer à quelques kilomètres sur la commune de Saint Benoit.
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9 septembre 2010

Bulletins 2008

      

Chers Amis lecteurs,

Qui n’a pas goûté, en période estivale, la fraîcheur des ombrages pour un temps de repos, de lecture... ?

C’est ainsi que Nathanaël, en bon israëlite, méditait l’Ecriture quand Jésus le vit sous le figuier…

L’arbre est aussi lieu de rencontre !

Que ces quelques pages, livrées à vous en toute amitié, soient aussi Rencontre !   

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« UNE BONNE PAROLE »

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Au groupe 3 des cellériers réunis à Sainte-Croix du 9 au 13 juin, Mère abbesse a présenté le commentaire suivant.   

Dans la Règle de saint Benoît (R.B.), le cellérier (= l’économe) a une fonction importante. Il a charge de gérer les biens matériels et de fournir aux Frères tout ce dont ils ont besoin dans ce domaine dont il est le gardien. Ce Frère doit être un homme ajusté dans ses relations personnelles, dans son rapport aux biens, à l’argent et dans sa relation à Dieu.

Le chapitre 31 de la Règle qui le concerne, autorise à dire que deux verbes pourraient le caractériser : donner et recevoir. En effet, on lui demande… il donne, il distribue…

Mais, il n’a rien qu’il n’ait reçu, ou mieux qui ne lui ait été confié : les biens qui sont sous garde sont ceux du monastère, et il ne fera rien sans l’ordre de l’abbé. Il est dans la dépendance du serviteur, non servile mais judicieux (sapiens, et toute l’énumération qui suit…)

Il doit avoir soin de tout… Fidèle gérant, non pas tant pour augmenter les richesses du monastère (même si cela n’est pas à négliger..) qu’au profit de la vie des Frères (soin de leur équilibre par le biais des biens matériels).

Il prendra un soin tout particulier des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres… Non directement de nos jours, puisque généralement ce soin est confié à d’autres qu’au cellérier.

Le champ demeure très vaste. A quoi s’ajoutent à notre époque, selon les cas, l’administratif, le législatif, le social… tout cela est aujourd’hui très compliqué, demande temps et compétence … et encore … doit-on trouver du temps et se rendre disponible pour un tas de bricoles en plus : réparations de toute sorte…

« Une bonne parole ».

Il doit donner ce qu’on lui demande. Mais, il a ou il n’a pas…  Il doit toujours avoir à donner « une bonne parole » comme lui demande la Règle !

               Relisons les quelques versets de Ben Sirac qui entourent celui que cite Benoît et que la BJ intitule : la façon de donner :

               Mon fils, n’assaisonne pas de blâme tes bienfaits,

                              Ni tous tes cadeaux de paroles chagrines.

               La rosée ne calme-t-elle pas la chaleur ?

                              ainsi la parole vaut mieux que le cadeau.

Certes, une parole ne vaut-elle pas mieux qu’un riche présent ?

                              Mais l’homme charitable unit les deux.

L’insensé ne donne rien et fait affront,

Et le don de l’envieux brûle les yeux.

            (Siracide 18,15-18)

Nous savons le poids de la parole dans l’Ecriture. Elle engage (cf  Jephté… !). Il en va assez différemment dans notre propre civilisation ! Les paroles s’envolent… non sans avoir commis des préjudices, parfois…

La parole est le moyen relationnel, par excellence, pour l’humain. Entendons dans ce mot ‘parole’ plus que l’articulation de mots par le larynx : tout ce qui est communication.

On parle beaucoup de dialogue, de communication aujourd’hui. On sait que plus on parle d’une chose c’est que plus s’en fait ressentir le manque. Dialoguer est très difficile ! Communiquer est autre chose que dire des paroles.

Les Pères monastiques sont tous très attentifs à la parole, et même virulents souvent à l’égard du bavardage et des paroles vaines. Saint Benoît est bien dans cette ligne :

Est demandé le silence parfait à table (38), à l’Oratoire (52), pendant la lecture (48) ; durant la nuit (42), et jusque dans le contact avec les hôtes (53) si l’on en n’est pas chargé. On ouvrira la bouche que si l’on vous interroge… (Prologue)

Il s’agit de peser sa parole…. Et comme tout ce qui a du prix on l’économise !

Le rôle du silence :

La RB début par un appel à l’écoute. Le chapitre 6 traite de la retenue dans les paroles. Pourquoi cette volonté de surveiller sa langue ?

Pour éviter le péché, répond Benoît citant l’Ecriture à l’appui :

- Que le moine défende à sa langue de parler et, pratiquant la retenue dans ses paroles, garde le silence jusqu’à ce qu’on l’interroge. Selon l’enseignement de l’Ecriture, en effet, « on ne saurait éviter le péché en parlant beaucoup », et « le bavard ne marche pas doit sur la terre » RB 7

- Trois instruments des bonnes œuvres relèvent ce thème:

Garder sa langue de tout propos mauvais ou pernicieux.

Ne pas aimer à parler beaucoup.

Ne pas dire des paroles vaines ou qui portent à rire  (RB 4)

- Pour répondre à qui désire la vie et souhaite des jours heureux, le Prologue de citer le Psaume 33 : Garde ta langue de tout mauvais discours et tes lèvres de toute parole trompeuse.

Pour maîtriser la langue, il faut la maîtrise des pensées. C’est toute l’ascèse des Pères dont s’inspire Benoît, jusqu’à réduire mêmes les propos édifiants (RB 6)…

Exercice de carême (sur des points qui devraient être observés en tout temps !), la retenue dans les entretiens et les plaisanteries. (RB 49).

Qu’il ne rapporte pas sans discernement à autrui ce qu’il aurait vu ou entendu hors du monastère, parce qu’il peut en résulter une ruine spirituelle. Celui qui oserait le faire sera soumis à la correction régulière. (RB 67).

On a pu voir et entendre de belles et bonnes choses ! Ce n’est pas pour autant qu’il est bon de les rapporter… Il y faut du discernement.

Il s’agit de mesurer les conséquences de nos faits et gestes, de nos paroles…

Ce n’est pas ce qui entre dans le ventre qui souille l’homme, mais ce qui sort de sa bouche, dira Jésus.

Notre propre expérience  nous le dit : il se passe un trafic, un bouillonnement, un cinéma... énorme en nous. Des faits, des événements, bien minimes parfois…  touchent en nous des points sensibles, des blessures profondes plus ou moins conscientes, voire ignorées qui bouleversent totalement la personnalité…  Une parole, même tout à fait anodine, peut déclencher en nous une tempête…

Une maîtrise de tout ce remue-ménage s’impose pour que s’établisse la paix et pour éviter toute parole blessante pour autrui. Dans un tel état, une flèche aiguisée part si vite !...

             

Qu’il soit rempli de crainte, dit Benoît du cellérier.

Supposé avoir le/un pouvoir, il risque d’être « agressé » quand il n’a pas ce qu’on lui demande. Il faut le savoir : sa fonction le met en situation de pouvoir : il dispose, - même si c’est en serviteur, - de biens auxquels le Frère n’a pas le même rapport : il n’a pas, lui qui doit demander ! L’humilité est nécessaire, de part et d’autre, dans cette relation.

S’il doit veiller à son âme, c’est qu’il y a risque de « possession », mais aussi risque d’ « agression » qu’il devra combattre pacifiquement, et même faire en sorte de le prévenir, si possible… D’où la « bonne parole ».

A remarquer : Dans la citation qu’il fait du Siracide, Benoît ajoute l’adjectif ‘bonne’. Qu’est donc cette « bonne parole » si tout ce qui sort de la bouche est souillure… ? … Dieu seul est bon, dit Jésus.

Point crucial et lieu pascal.

La RB nous présente le silence comme l’écrin de la parole, le lieu où résonne la parole. Il doit avoir son importance relativement à « la bonne parole ».

Notons toutefois que le silence peut être aussi prison de la parole. Tel le mutisme venant d’une disposition psychologique négative. Pensons encore aux différents totalitarismes qui réduisent le peuple au silence. Sans parole, il n’existe plus… L’humain est dans la parole.

C’est Maurice Bellet qui, dans son livre Le meurtre de la parole, m’inspire ces quelques réflexions. Il médite sur le processus et l’épreuve du dialogue radical (au-delà de l’interreligieux) aujourd’hui (dans la post-modernité) à la lumière du mystère pascal : le Verbe mis à mort sur la Croix. La trajectoire étant la voie de la désappropriation, terme si cher à saint Benoît.

Nous sommes des « êtres » de parole. La parole nous met en relation en vue de la Vérité qui est insaisissable. Aussi sincère soit-elle, notre parole nous laisse à mille lieues de la Vérité. Nul ne la possède et chacun y va selon sa propre voie. Le dialogue est aussi nécessaire que difficile et même risqué.

L’autre du dialogue est toujours différent et chacun doit garder son identité… Comment alors concilier accord et différence ? Une véritable tâche.

Nous sommes plus ou moins enfermés dans notre parole. C’est la parole de l’autre qui va me séparer de moi-même, trancher en moi quelque chose de moi-même qui, je le pensais, était très important... Elle me dépouille de mes fausses sécurités, de mes convictions mêmes, insuffisamment fondées… Renoncer à cette dépossession c’est risquer de faire de la parole une prison.

L’écoute est la base du dialogue. Ecouter suppose renoncer à vouloir convaincre l’autre, ce qui serait le dévorer, et renoncer à ne pas vouloir l’entendre, ce qui serait le vomir. La parole peut être meurtrière… Il faut renoncer aux évidences du savoir, aux discours doctrinaires comme aux accommodements trop faciles. Se laisser déposséder de l’Evangile même, dit Bellet, au nom de l’Evangile. Nous sommes si habiles à le travestir pour le détourner à notre profit… au détriment de la Parole à double tranchant.

Vient l’épreuve du grand silence…la perte de tout… Lieu de la présence. Il y faut une disposition pure… totale désappropriation en la Présence… pure écoute écoutante. Et, venant d’ailleurs, la Parole. Et nous (l’un et l’autre du dialogue si chacun suit ce processus de désappropriation) naissons dans la Parole donnée. Il faut être à nu devant la Parole, la Parole créatrice.

Revenons au cellérier. N’ayant rien à donner au Frère qui demande, l’un et l’autre dans le « manque » sont dans les dispositions de la rencontre, à nu devant la Parole qu’ils vont accueillir, ensemble. Telle serait la « bonne parole » à donner en la recevant. Et ne pensons pas que ce soit réservé au cellérier ; il est simplement dans les meilleures conditions pour en faire l’expérience.

Nous sommes renvoyés au plus profond de nous-même. Donner une parole créatrice à l’autre. Et recevoir de l’autre une parole me séparant de toutes possessions… Dans la désappropriation évangélique où nous engage saint Benoît, nos échanges fraternels seraient parole créatrice pour les frères, pour la communauté !...

Pour conclure rappelons-nous la pratique de notre Règle. Après Complies s’impose le silence de nuit, rompu seulement au matin par le RENCONTRES  AVEC  LE  RABBIN  PHILIPPE  HADDAD

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              Invitée à rencontrer le Rabbin Philippe Haddad lors de sa venue à la Synagogue de Poitiers  le 02/12/07,  j’ai été de suite profondément touchée par la personnalité de ce croyant ouvert au dialogue interreligieux.

               Ce 2 décembre, à quelques jours de la fête de Hanouka, le thème choisi était en rapport avec cette « fête des lumières », fête de la victoire des Juifs sur les Grecs qui,  à la requête d’Antiochus IV, avaient profané le Temple vers 170 avant J.C.

               Pour purifier le Temple et célébrer la victoire, les Juifs veulent alors allumer le chandelier à 7 branches avec de l’huile casher.  Mais la seule fiole d’huile restante ne peut alimenter ce chandelier qu’un seul jour,  et il faut 7 jours pour préparer l’huile nécessaire ! Or, miracle, l’huile brûle pendant 8 jours !

               A cette époque, il y avait un réel danger : celui de détruire spirituellement le peuple juif par assimilation. Aussi les Rabbins ont-ils ritualisé cette fête jugée importante.

               Chaque soir, en famille et à la Synagogue, on allume une chandelle :  la 1ère, le 1er jour, la 2ème le 2ème jour, etc…la 8ème, le 8ème jour.  (1+2+3+4+5+6+7+8 = 36  origine des 36 chandelles !)

               Dieu est lumière, il repousse l’obscurité.

               Chaque soir, on met un peu plus de lumière et on dépose le chandelier à la fenêtre : il faut répandre la lumière ; elle doit triompher dans le monde entier comme elle triompha au début de la Création : ‘Il y eut un soir,  il y eut un matin’.  (Gn.1)

De la Synagogue au Centre  Théologique.

              Dans le cadre des relations judéo-chrétiennes, le Centre Théologique de Poitiers a invité le Rabbin Philippe Haddad à donner trois conférences sur le sujet : Les repas de Jésus, une lecture juive des Evangiles.

              En fait, le Rabbin nous a donné des clés de lecture nous montrant, à partir de la Bible et de la Tradition orale d’Israël (Midrash, Talmud, Kabbale), l’importance des repas dans nos deux traditions juive et chrétienne. « Manger n’est plus un simple acte naturel, mais une conduite religieuse et spirituelle ».

               Si, à première vue, manger dans une dimension spirituelle peut étonner, il suffit de parcourir la Bible pour en  être convaincu. Dans la Bible, pas d’opposition entre corps et âme :

               - De l’humus est sorti l’Adam, le ‘glèbeux’, à qui Dieu insuffle son esprit : l’homme est  pluriel  (dimensions matérielle et spirituelle).

               - Que ce soit le rêve de Jacob où l’échelle relie terre et ciel, ou le songe de Joseph qui voit les gerbes des champs et le soleil, la lune et les étoiles, il y a toujours un lien entre le monde d’en bas et le monde d’en haut.

               Et l’homme, créature de Dieu, doit s’investir dans le monde ; il est le partenaire de Dieu.  Le 7e jour, Dieu entre en Chabath - il cesse de travailler - pour que l’homme achève son œuvre : il doit gérer les biens qui lui sont confiés.

               Dieu crée un jardinier en Eden. Au départ, l’homme prend la nature à l’état pur : il est végétarien  (Gn 1,29).  Puis, après la chute, chassé du Paradis, il doit manger son pain à la sueur de son front (Gn 3,19).

           Et Dieu accompagne l’homme qui va chercher à l’extérieur ce qu lui manque : la grâce. L’expérience du « manger », c’est l’expérience d’un manque à combler ; c’est l’expérience d’une créature qui va chercher dans le monde son manque et va avoir la bénédiction de Dieu. « Tu mangeras, tu te rassasieras et tu béniras le Seigneur ton Dieu ». (Dt 8/10).

Le rassasiement, c’est la bénédiction de Dieu. Il est à noter, dans la Bible, que chaque sortie de catastrophe est suivie d’un nouveau rapport à la nourriture qui appelle au partage :

- Aux rescapés du déluge, Dieu donne « toute chair » : l’homme devient ‘carnivore’ (Gn 9,3).

- Pour la sortie d’Egypte, Dieu donne la Loi de Pâque : pain azyme et agneau grillé qui marqueront la rupture avec la terre de  servitude, la libération du peuple hébreu.

- Au désert, Dieu donne la manne qui vient du ciel.

«Mais l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de ce qui sort de la bouche de l’Eternel, l’homme vit».  (Dt 8,3).

La Parole de Dieu est l’invité spirituel qui nous éclaire : « Rabbi Simon enseigne : Trois personnes qui ont mangé à la même table mais qui n’y  ont  pas dit de paroles de la Torah, c’est comme si elles avaient mangé des sacrifices pour les morts (cf. Ps 106,28).  Par contre, trois personnes qui ont mangé à la même table et qui y ont dit des paroles de Torah, c’est comme si elles mangeaient à la table de Dieu.»  (Traité des Pères III,3).

              Manger, c’et recevoir la Vie, car en mangeant, je reçois la Source qui donne la Vie.

               Le don de Dieu ne connaît pas de limites et l’homme créé à l’image et à la ressemblance de son Créateur doit s’inscrire dans le geste de Dieu : cette nourriture, cette Parole, sont à partager, tel Abraham au chêne de Mambré (Gn 18).

Le partage du pain, signe de la présence de Jésus : le récit d’Emmaüs  (Luc 24/17-35)

- Les disciples font route avec Jésus qui les a rejoints mais, enfermés dans leur désespoir, ils ne le reconnaissent pas.

- Jésus, tel un bon pharisien, égrène des versets de la Torah et les commente pour leur  re-donner espérance : le cœur des disciples est tout brûlant, mais ils ne le reconnaissent pas.

Enfermés dans leur jouissance, comme ils étaient enfermés dans leur désespoir, ils ne sont pas ouverts au ‘Maître de l’embrasement’.

- Jésus veut disparaître… les pèlerins d’Emmaüs le retiennent.

- Jésus va prendre le pain, sans doute avec les dix doigts  (aujourd’hui encore, on prend ainsi le pain pour rappeler les dix étapes qui séparent la semence du pain).                 Cette transformation du blé en pain a une dimension messianique. Le grain se révèle dans le pain, le pain est la réalisation d’une espérance.

- Jésus dit la bénédiction,  sans doute à l’invitation des disciples.

Avant les repas, le Maître de la maison ou la personne la plus respectable bénit Dieu ‘Roi du monde’ pour la nourriture qu’il nous donne :

- Jésus rompt le pain et le partage.

Rompre le pain, c’est faire alliance avec ceux avec qui on va manger.

Partager, manger, c’est être dans la vigilance avec l’autre. Jésus, en partageant le pain, met ses disciples dans la vigilance du regard : alors, ils le reconnaissent.

Soyez dans la fraternité, vous serez dans l’espérance ».

Mettre son espérance en Dieu ne nous dispense pas d’agir. Dieu donne la vie et la bénédiction mais ce sont les hommes qui écrivent l’histoire. L’homme doit accomplir son humanité pour entrer dans le8e jour. Alors, nous serons conviés au grand festin qu’est le Royaume de Die. (cf Mt 22)

                                                                                                Sœur Bénédicte

            Philippe  Haddad

            Rabbin à la Synagogue des Ulis (91)

               Extrait du Midrash

          « le recueil de  Simon »

Il est dit  (Dt 4,11) « et la montagne du Sinaïe brûlait de feu » : On raconte à propos de Abouya, le père de Elisha, qu’il était un notable de Jérusalem. Lorsque vint le jour de circoncire son fils, il invita les anciens d’Israël, dont Rabbi Eliézer et Rabbi Josué… Immédiatement, ils commencèrent à étudier la Torah, de la Torah ils passèrent aux Prophètes, et des ProphètesProphètes aux Hagiographes, au point que leurs paroles leur procuraient une joie intense comme si elles avaient été données au mont  Sinaïe, au point qu’un feu les enveloppa. Abouya monta vers eux et leur dit : Etes-vous venus pour brûler ma maison ? Ils répondirent : A Dieu ne plaise ; mais nous nous occupions  de la Torah, et cette Torah ne fut-elle pas offerte au milieu du feu, comme il est dit : « et la montagne brûlait de feu ».

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Du côté des Oblats

« Spiritualité bénédictine »

Notre oblature fête cette année son dixième anniversaire et nous avons eu la joie de célébrer, au cours de notre W.E. de juin, l’entrée en formation d’un nouveau membre.

Sollicitée par le Bureau du SOB (Service des oblatures bénédictines) pour participer à une table ronde au cours de l’Assemblée Générale, voici en partage la deuxième partie de notre exposé. Il s’agissait du thème « Adoration eucharistique et spiritualité bénédictine »

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Malgré toute la richesse d’une adoration eucharistique bien vécue, cette dévotion ne me semble pas correspondre à la spiritualité bénédictine. Elle peut être un moyen, mais n’entre pas dans ce qui fait le fondement de notre vie à l’école de Benoît.

Le Christ que nous adorons dans l’Eucharistie est le Christ pascal, mort et ressuscité. L’Eucharistie le rend présent sacramentellement, sous les espèces du pain rompu et du vin partagé. Mais parce qu’il est ressuscité, le Christ est présent à notre monde, présent dans tout l’univers, et c’est pour cela que l’Eucharistie est possible.

D’ailleurs, Paul VI précise que la présence eucharistique du Christ est appelée « réelle non à titre exclusif, mais par excellence » et d’affirmer qu’il est présent dans la proclamation de la Parole, dans la personne du célébrant, dans l’assemblée, lorsque l’église prie et chante les psaumes… (cf. Constitution sur la Liturgie n° 7)

Le Christ pascal, dans sa mort, nous engendre à sa vie de Fils, à la vie filiale. La « filialité » me semble être ce qui pourrait caractériser la « spiritualité » bénédictine. « Revenir au Père, dans le Fils », n’est-ce pas à cela que Benoît nous invite dès le Prologue de sa Règle ? Le Christ est au centre : « ne rien préférer à l’amour du Christ », voir le Christ dans l’Abbé, l’hôte, le malade, les frères… Le Christ que Benoît appelle « Père »… l’Abbé tient la place du Christ, c’est pour cela qu’il sera appelé « père ».

La RB ne dit rien de la pratique eucharistique. Mais elle est riche de bien des aspects eucharistiques. Il est question du lavement des pieds à plusieurs reprises. Or dans l’évangile de Jean, le lavement des pieds est la grande parabole de l’Eucharistie. Ce geste du Serviteur qui nous révèle le vrai visage de notre Dieu ne serait-il pas ce qui rend possible pour nous le chapitre 7 de la RB ?

Nous retrouvons dans la RB le mouvement de l’eucharistie : recevoir du Père et faire remonter ces dons dans l’action de grâce du Fils. Adorer, n’est-ce pas accueillir le don de Dieu ?         

          De plus, cette présence du Christ Ressuscité nous la vivons spécialement dans la lectio divina qui est bien un des piliers de notre vie, notre charisme propre. Comme l’Eucharistie elle nous transforme en profondeur si nous avons le courage de nous livrer et de nous laisser déposséder. N’est-elle pas elle aussi, un moyen fort pour la nouvelle évangélisation ?

Cette mise à l’ombre de la Parole peut se faire sous le mode du partage. La qualité du silence et des échanges sont parfois marqués par la présence très forte du Christ au milieu de nous.

          La prière des Heures qui tient une si grande place dans la pensée de Benoît, nous permet également une rencontre très forte avec le Christ et l’église. A travers les psaumes nous reprenons les joies et les souffrances de nos frères à travers le monde, nous les jetons en quelque sorte dans le mystère pascal du Christ. Nous les vivons dans l’attente de la plénitude, du Royaume, comme dans la certitude et le tourment du « déjà et du pas encore ».

         Le Christ, nous sommes invités à le reconnaître et à l’adorer dans nos frères, au travail, dans ceux que nous accueillons ou rencontrons, dans le métro ou dans le train (ils n’existaient pas au temps de St Benoît !), dans la nature, dans les difficultés qui nous donnent l’occasion de durer dans la patience, dans l’humble service quotidien à la suite du Serviteur. Reprenez la RB, du Prologue au chapitre 72 surtout, et vous verrez que Benoît nous invite à vivre tournés vers le Père, dans l’action de grâce du Fils bien-aimé, à faire de notre vie une eucharistie. Et cela n’est pas réservé aux moines et aux moniales !

         Dans la foi, nous pouvons ainsi vivre l’adoration qui est le fondement de l’être chrétien. Alors, c’est la création, ce sont nos frères humains (visages transfigurés par la joie de Dieu ou marqués par la souffrance et l’échec) qui deviennent monstrances, ostensoirs, nous dévoilant un peu de la Gloire du Père, dans le Christ et la puissance de l’Esprit.

                                                          Sr Marie-Madeleine    

                     

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VIVRE L’EVANGILE AVEC SAINT BENOIT

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Année  Saint Paul en union avec l’église universelle

Chaque W.E. est préparé par un travail personnel à partir d’une grille de recherche et se déroule ensuite sous forme de partage, de courtes interventions pour compléter ou préciser, de recherche en commun, avec toujours une référence à la Règle de Saint Benoît.

25-26 octobre 2008 :

L’espérance du Christ   -        I et II aux Thessaloniciens

Fidélité au Christ              -   Lettres à Tite et à Timothée

03-04 janvier 2009 :

La vie quotidienne             -                                 Lettres I et II

avec le Christ                                                   aux Corinthiens

25-26 avril    2009 :

Le salut dans le Christ     -                  Lettres aux Galates

et aux Romains

été 2009 (date non encore fixée) :

Le Christ est Seigneur      -        Lettres aux Colossiens,

                                                                         aux Ephésiens et Philippiens

                   

              Inscription 15 jours avant  chaque W.E.

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Pour l'inauguration 

de  la dixième  décennie 

de  son  existence.

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Quand on habite à Neuville du Poitou, on peut envisager une fête de famille à l'Abbaye Sainte Croix. Pas de meilleure solution d'ailleurs pour y faire participer sa propre fille qui est justement l'hôtelière.

C'est donc Dimanche 6 Juillet, que notre communauté s'unit aux 50 membres représentant la nombreuse famille de Mr Martial Adenis-Lamarre "pour l'inauguration de son entrée dans la dixième décennie de son existence", comme il le dira lui-même.

Un fauteuil lui a été préparé pour la messe célébrée par son petit-neveu, le Père Pierre Deprecq responsable du séminaire de Bordeaux ; durant la procession des offrandes - accompagnée par le hautbois d'un autre neveu Vincent Adenis-Lamarre - Pierre  (4 ans) et Nicolas (2 ans) arborent fièrement chacun une fleur aux côtés de leurs parents Charlotte et Sergueï, portant la coupe des hosties et le calice ;  les chants  ont été adaptés pour la circonstance.

A l'issue de la messe, tout en partageant le verre de l'amitié au grand parloir, nous pouvons féliciter un généreux et fidèle ami de Ste Croix, reconnaître des visages ou mettre des visages nouveaux sur des noms connus.

Mais si je relate cette journée c'est surtout pour vous faire savoir comment un nonagénaire reste en forme en essayant de faire à l'automne de sa vie, ce qu'il a essayé de faire tout au long de sa longue existence, c'est-à-dire essayer de mettre en œuvre le célèbre précepte : 

MENS  SANA  IN  CORPORE  SANO.

Un ancien notaire connaît le latin -  Cela se traduit :

UN  ESPRIT  SAIN  DANS  UN   

CORPS   SAIN

               Et voici la recette qu'il avait suffisamment expérimentée pour  la livrer de mémoire à ses proches,  sans aucune note.

"Avoir un esprit sain, c'est tout simplement avoir un idéal, qu'il soit religieux ou laïc, centré sur la recherche du bonheur d'autrui, manifesté par la recherche de la paix, l'amitié, le sens de l'accueil, la bienveillance, la gentillesse, la simplicité, un sourire, l'acceptation de l'autre tel qu'il est. C'est la manifestation de sa joie de vivre, par l'optimisme et l'espérance. C'est la compassion pour les joies et les peines de tout un chacun. C'est le souci du service, de l'aide et de l'assistance, dans tous les domaines et sous toutes ses formes.

Avoir un esprit sain, c'est encore savoir pardonner et demeurer en paix avec tout le monde. Le pardon cette disposition de l'esprit qui permet d'atteindre une sérénité intérieure que ne peuvent imaginer ceux qui n'ont jamais eu l'occasion de la pratiquer.

Avoir un corps sain, c'est tout simplement, chaque matin au saut du lit, effectuer quelques exercices de culture physique pour se mettre en forme et attaquer la journée d'un pas décidé, dans la joie et l'optimisme pour l'accomplissement  des tâches quotidiennes avec le souci constant du toujours aller vers le mieux.

C'est aussi surveiller et ménager sa santé. La santé, ce trésor inestimable, qu'il faut savoir chouchouter davantage chaque jour pour en extraire tous les effets bénéfiques. 

  C'est encore comme nous le faisons aujourd'hui, croquer à belles dents dans tous les plaisirs de la vie, à condition de le faire avec cette modération et cette sagesse qui  permettront d'en apprécier d'autant mieux la saveur. "

Mais à l'adresse des plus jeunes qui cherchent la clé du bonheur, -vous tous qui forgez le futur avenir- l'invitation à œuvrer pour créer en vous un esprit sain dans un corps sain s'accompagne de quelques précisions :

"Ce n'est pas une tâche facile. Vous allez vous heurter à bien des difficultés, des obstacles, erreurs, échecs, déceptions et désillusions. Mais il ne faut jamais désespérer ni lâcher le manche après la cognée. Il faudra persévérer, persévérer, persévérer … lutter farouchement et avec opiniâtreté pour parvenir à cette sérénité intérieure qui est un des éléments clefs de notre bonheur sur cette terre.                                                      

               Tel est le beau message que nous laisse Mr Adenis avant de rejoindre, "moi aussi, le moment venu, ceux qui nous ont précédés et qui nous attendent là-haut dans les cieux."

Nous le remercions de tout cœur. Et comme nous avons grand besoin de garder près de nous des hommes sages, avec tous ceux et celles qui ont déjà soufflé 90 bougies, nous prenons rendez-vous dans l'amitié pour l'inauguration du deuxième siècle de leur  vie !

                                                 

                                                                          sr Agnès

                                                                                                                                                                  

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Ne vous faites pas des trésors sur la terre

                     

Le mot trésor est fortement chargé par notre imaginaire. Un trésor a motivé la quête de bien des pirates ou des chevaliers pour lesquels nous avons vibré dans les contes de nos enfances. Le prix d'un trésor peut être variable, il peut même n'avoir d'importance que pour celui qui le possède. Il peut aussi être si précieux qu'il soit lié à notre raison d'être. Mais quelque soit ce trésor, une chose est sûre : il faut le mettre en sécurité.

Cette notion est si évidente qu'on peut l'occulter. On peut entendre dans l'opposition que fait Jésus un conseil d'amasser plutôt un trésor fait de biens célestes que de biens terrestres, de biens éternels que de biens périssables. Or Jésus ne nous parle pas du contenu du trésor, de ce à quoi nous attribuons une valeur, mais du lieu où nous l'enfouissons pour le protéger. « Ne vous faites pas des trésors sur la terre, (...) faites-vous des trésors dans le ciel ». Les biens thésaurisés sont les mêmes ici-bas ou dans le ciel, c'est à nous qu'il revient de les choisir, mais Jésus nous demande de les enfouir dans le ciel et non sur la terre.

Alors seulement, le contenu du trésor est mis en question. Pour être placé dans le Ciel, de quoi peut-il être composé ? De tout manifestement, puisque Jésus ne semble pas mettre de restriction. Il ne semble pas y avoir de « poids » limite qui conditionnerait cette « ascension » de notre trésor dans le ciel. Les mots employés nous trahissent. Le Ciel n'est pas au dessus des nuages. Il est don de soi. La différence entre un trésor sur la terre et un trésor dans le ciel est la différence entre amasser, égoïstement et cupidement, et donner, dans la charité fraternelle. On fait fructifier son trésor - d’autres paraboles nous le rappellent - quand on l’expose, quand on le partage, quand on le donne.

D'où l'avertissement de Jésus. « Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur ». Si nous cédons a la cupidité et ê l'envie, notre trésor est sur la terre, notre cœur y sera donc aussi, et il en mourra. Pour que notre cœur vive, il lui faut entrer dans la dynamique de la vie, qui est don de soi : il ne se dilate que s'il aime.

Ce choix de l'emplacement de notre trésor est donc crucial. Or il dépend de notre capacité à discerner. Il dépend de notre œil. L'œil éclaire tout le corps de la lumière qu'il perçoit de l'extérieur. L'œil simple est celui qui ne se laisse pas séduire par la cupidité et la jalousie. L'œil mauvais est avare de ses biens, ou envieux de ceux des autres. Il est obscur et plonge tout le corps dans l'obscurité.

Que le Seigneur ouvre les yeux de nos âmes à la grandeur de son amour et nous introduise dans la contemplation du trésor qu'il nous a acquis : sa vie, en plénitude, qu'il donne de vivre dès à présent pour nous faire déjà goûter la joie du Ciel. Si nos yeux voient clair, le contenu du trésor nous apparaîtra avec évidence : Dieu, lui-même. Ne l'emprisonnons pas dans nos logiques terrestres, laissons-nous gagner par le Ciel, laissons-nous bonifier par notre trésor et nous serons transformés en lui.

                                                Père Jean-Marie Rasoamparany

                                                      Capucin de Madagascar

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